repères_2025

REPÈRES (AOÛT 2025) – REVUE-GFP N°5 – 2025

BUDGET DE L’ÉTAT ET DES OPÉRATEURS
->Données générales sur les finances publiques

Enquête mensuelle de conjoncture à début août 2025

Le 11 août, la Banque de France a publié son enquête mensuelle de conjoncture qui décrit la situation conjoncturelle du mois précédent et prévoit le PIB trimestriel, grâce aux réponses de 8 500 dirigeants d’entreprise. Selon l’enquête, l’activité a continué de progresser en juillet de manière significative dans l’industrie et le bâtiment, et plus modérément dans les services marchands. En août, d’après les anticipations des entreprises, l’activité demeurerait en hausse dans l’industrie et le bâtiment et évoluerait peu dans les services. Les carnets de commandes sont jugés un peu moins dégarnis dans l’industrie hors aéronautique, ainsi que dans le bâtiment, tout en restant relativement bas. Les prix de vente sont jugés globalement stables dans les trois secteurs. Les difficultés d’approvisionnement restent dans l’ensemble faibles, hormis dans l’aéronautique et dans l’automobile. Les difficultés de recrutement concernent 18 % des entreprises, en baisse d’un point par rapport au mois dernier. Et sur la base des résultats de l’enquête, complétés par d’autres indicateurs, la Banque de France estime que le PIB continuerait de croître au troisième trimestre sur un rythme proche de celui du trimestre précédent (+0,3 % selon l’estimation de l’INSEE).

En août 2025, les prix à la consommation augmentent de 0,9 % sur un an

Dans une note publiée le 29 août 2025, l’INSEE indique que sur un an, selon l’estimation provisoire réalisée en fin de mois, les prix à la consommation augmenteraient de 0,9 % en août 2025, après +1,0 % en juillet. Cette légère baisse de l’inflation s’expliquerait par le ralentissement des prix des services, notamment ceux des transports. À l’inverse, les prix de l’énergie diminueraient à un rythme moins soutenu qu’au mois précédent, tirés par ceux des produits pétroliers. Les prix de l’alimentation et du tabac augmenteraient au même rythme qu’en juillet, et ceux des produits manufacturés diminueraient à un rythme très légèrement plus soutenu qu’au mois précédent.

->Procédure budgétaire

Conférence de presse du Premier ministre et article 49 alinéa 1 de la Constitution

Ce lundi 25 août 2025 à 16 heures, le Premier ministre, F. Bayrou, a tenu une conférence de presse pour lancer la rentrée politique après avoir passé une bonne partie de l’été à préparer le projet de loi de finances pour 2026. Le Premier ministre abordait une nouvelle étape de son entreprise de persuasion de l’opinion du bien-fondé de son plan budgétaire annoncé le 15 juillet dernier qui comprenait notamment une « année blanche » fiscale et la suppression de deux jours fériés (v. Repères, juillet 2025). Revenant notamment sur le sujet de la charge de la dette publique, le Premier ministre a indiqué au cours de cet entretien : « l’an dernier, c’était 60 Md€. Cette année, ce sera 66 Md€. L’année prochaine, en 2026, au mieux 75 Md€. Et si nous ne corrigeons pas la trajectoire, en 2029, dit la Cour des comptes, 107 Md€ ». Pour F. Bayrou, « ce débat qui est vital pour notre pays, depuis des semaines, a sombré dans la confusion. C’est pourquoi il faut une clarification. Le débat devrait être centré autour de la nécessité vitale de dépenser moins et de produire plus ». Pour clarifier les choses, F. Bayrou a justement annoncé qu’il engagerait le 8 septembre prochain la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale réunie en session extraordinaire, autour de la « question centrale » de « la maîtrise de nos finances publiques » et à l’occasion d’une déclaration de politique générale. Pour le Premier ministre, ce vote « consacrera la dimension de l’effort » de près de 44 Md€ de réduction du déficit public de la France, et seulement ensuite aura lieu « la discussion » sur « chacune des mesures de ce plan d’urgence ».

FINANCES SOCIALES
->Situation des comptes sociaux et financement de la protection sociale

La lettre d’orientation sur la suppression des jours fériés

Le 9 août, le Premier ministre a adressé aux partenaires sociaux un document d’orientation précisant les conditions dans lesquelles devra s’opérer la suppression de deux jours fériés annoncée le 15 juillet (v. Repères, juillet 2025). Le Premier ministre, F. Bayrou, a proposé la suppression du lundi de Pâques et du 8 mai, mais il laisse la porte ouverte à d’autres choix si cela paraît plus approprié. Le document précise que les salariés ne seront pas payés pour ces deux jours travaillés supplémentaires et que les entreprises devront s’acquitter d’une contribution versée au budget de l’État dont il est escompté un rendement de 4,2 Md€ en 2026. Le Gouvernement a demandé aux partenaires sociaux de lui faire connaître d’ici le 1er septembre s’ils souhaitent engager une négociation, laquelle devra être en tout état de cause terminée pour le 30 septembre, tout en laissant entendre l’existence de petites marges de manœuvre notamment pour le régime spécial d’Alsace Moselle. La réaction des syndicats a été très négative, certains allant jusqu’à dénoncer « l’ouverture en grand de la porte du musée des horreurs », le patronat n’y est guère favorable non plus, craignant la réédition du délitement de la précédente mesure du « jour de solidarité » (suppression du lundi de Pentecôte en 2005), laquelle s ’est traduite finalement par la persistance d’une journée non travaillée dans la plupart des secteurs mais avec l’imposition d’une contribution pour les entreprises. Mais dans son entretien à « CNews » et « Europe 1 » le 31 août, le Premier ministre a réaffirmé l’importance qu’il attachait à cette mesure comme signal de la nécessité de travailler plus, tout en laissant entendre qu’on pourrait se limiter à la suppression d’une seule journée.

->Dépenses de santé/Hôpital/Assurance maladie

Étude de la DREES sur le taux d’effort dans le financement de la santé / au revenu

À un moment où le Gouvernement recherche des pistes pour freiner les dépenses de santé(v. Repères, juillet 2025), se pose la question de l’effet anti redistributif de mesures qui vont se traduire par une augmentation du reste à charge des ménages ; une étude de la DRESS a analysé la part des dépenses de santé aux différents niveaux de revenu des ménages. Les dépenses de santé – entendues comme le cumul des restes à charge, des cotisations sociales et taxes finançant l’Assurance maladie obligatoire ainsi que des primes versées aux complémentaires santé – ont représenté en 2018 en moyenne 15 % de leur revenu, soit environ 6 800 € par an. Il en ressort que le taux d’effort moyen – c’est-à-dire le montant acquitté des dépenses de santé comme défini ci-dessus rapporté au revenu du ménage – varie peu en fonction du niveau de revenu et de la situation socio-professionnelle : ainsi le taux d’effort moyen est-il de 14 % ans pour la tranche des plus modestes (niveau de vie inférieur à 60 % du revenu médian) contre 18 % pour la tranche la plus aisée. Mais la situation varie nettement en fonction de la position d’activité puisque les retraités les plus modestes ne consacrent à la santé que 14 % de leur revenu et les retraités les plus aisés seulement 11 %, ce qui s’explique par le fait que les taux de prélèvement –cotisations sociales et CSG – sont plus élevés chez les actifs que chez les retraités. Il s’ensuit donc que le système de financement de la santé est progressif chez les actifs et régressif chez les retraités. La progressivité du système paraît trouver ses limites aux niveaux de taux d’effort les plus élevés, puisque, dans les 1 % de ménages connaissant les taux d’effort les plus importants, les trois quarts de l’effectif sont représentés par des ménages modestes, ce qui peut s’expliquer par le non-recours aux aides prévues pour l’accès aux complémentaires santé ou par la couverture par des contrats offrant de moindres garanties.

->Autonomie et dépendance

Rapport IGA / IGF sur les pistes d’économies en matière d’aide à l’autonomie

L’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) ont publié un rapport conjoint sur les divergences territoriales dans les modalités d’attribution de 5 aides sociales légales en matière d’autonomie : l’allocation adulte handicapé (AAH), l’Allocation d’éducation d’enfant handicapé (AEEH), l’Allocation personnelle d’autonomie (APA), la Prestation de compensation du handicap (PCH) et l’Aide sociale à l’hébergement (ASH). Le montant cumulé de ces aides a été de 30 Md€ en 2023, financés à hauteur de 42 % par les départements dont elles représentent plus des deux tiers des budgets (ASH, APA et PCH), de 38 % par l’État (AAH) et de 20 % par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (AEEH, et concours financiers aux départements pour l’APA et PCH). Les dépenses au titre de ces aides s’inscrivent dans les 90 Md€ de « l’effort national pour l’autonomie » (l’autre part importante de l’effort étant représenté par les dépenses des établissements médico-sociaux) ; au sein des cinq aides qui ont fait l’objet de la mission, la charge la plus importante est celle de l’AAH (38 % du total), les dépenses consacrées au handicap étant celles qui ont le plus progressé au cours de la dernière décennie, mais le vieillissement de la population devrait entrainer une forte augmentation de l’APA. La mission a fait deux observations majeures : en premier lieu, l’existence de disparités territoriales, qui ne s’expliquent qu’en partie seulement par des facteurs socio-démographiques (âge des populations, niveaux de revenus, prévalence des limitations d’activité, inégalités dans l’offre de services…), les autres facteurs étant les différences des modalités d’attribution ( conséquence de la subjectivité dans l’appréciation de la situation des demandeurs) et de la gestion des aides ; la mission propose une amélioration du cadrage national de la politique de ces aides ainsi qu’une homogénéisation des pratiques d’instruction des dossiers. En second lieu, la mission relève l’insuffisance du contrôle sur ces prestation et la quasi-inexistence de dispositifs de lutte contre la fraude ; elle préconise de généraliser le contrôle de l’effectivité des dépenses notamment pour l’APA et la PCH. Elle propose également un renforcement de la progressivité du barème pour l’APA et une meilleure articulation avec le crédit d’impôt pour les services à la personne. Au total, la mission formule 23 recommandations qui pourront nourrir le plan d’économies sur le volet social du programme d’ajustement annoncé par le Premier ministre le 15 juillet dernier : le montant escompté de celles-ci pourrait être compris entre 0,8 et 1,4 Md€.

->Assurance-chômage

La lettre de cadrage sur l’Assurance-chômage

Le Premier ministre a adressé le 9 août aux partenaires sociaux une lettre de cadrage pour la renégociation de la convention d’Assurance chômage 2026-2029. Ceux-ci avaient trouvé un accord à l’automne (v. Repères, nov. 2024), mais celui-ci avait été rejeté par le Gouvernement au motif qu’il n’allait pas assez loin dans les économies pour les quatre années à venir. Après avoir rappelé que la baisse du taux de chômage s’était interrompue à la fin de 2023 et que les prévisions financières de l’UNEDIC se situaient significativement en deçà de ce qui était attendu (v. Repères, juin 2024), le Gouvernement demande aux partenaires sociaux de s’entendre sur des modalités d’indemnisation qui permettent de dégager entre 2 et 2,5 Md€ par an sur la période 2026-2029, pour atteindre a minima 4 Md€ d’économies en régime de croisière à partir de 2030. La lettre de cadrage donne quelques orientations sur les mesures à prendre, comme la révision de l’indemnisation des ruptures conventionnelles, l’augmentation de la durée minimale d’activité pour ouvrir droit à indemnisation, la limitation de la durée d’indemnisation, ainsi qu’un nouveau durcissement pour les plus hautes rémunérations. En contrepartie, le Gouvernement s’engage à ce que les économies soient exclusivement affectées à la réduction de l’endettement du Régime, sans qu’il soit question d’augmenter la contribution à France Travail. Il a donné jusqu’au 15 novembre 2025 aux partenaires sociaux pour parvenir à un accord. Ce document a été très mal reçu par les syndicats qui ont refusé de rencontrer la ministre chargée du travail. Ce serait la quatrième réforme de l’Assurance chômage en huit ans : en 2017, extension du bénéfice de l’indemnisation aux démissionnaires et substitution de la CSG aux cotisations des salariés ; en 2019, premier tour de vis sur les modalités d’indemnisation, qui s’en est accompagné d’un second en 2021 : durcissement des conditions d’ouverture du droit à l’indemnisation, limitation du recours à la permittence (pratique selon laquelle une personne ne travaille plus que par intermittence, sans pour autant travailler en permanence, tout en bénéficiant des indemnités de chômage), dégressivité de l’allocation pour les salaires les plus élevés et introduction d’un bonus-malus sur les cotisations employeurs pour dissuader la pratique abusive des contrats courts ; en 2022, introduction d’une modulation automatique de la durée d’indemnisation en fonction de la durée du travail (contracyclicité).

->Lutte contre la fraude

Un nouveau plan de lutte contre la fraude sociale

Pour remplir son objectif de récupération de 2,3 Md€ sur les fraudes qui est inscrit dans plan de réduction du déficit des comptes publics pour 2026 (v. Repères, juillet 2025), le Gouvernement va présenter un projet de loi « relatif à la lutte contre les fraudes fiscales et sociales ». Les orientations du volet social de ce projet ont été présentées par la ministre des solidarités et de la santé dans un entretien au journal « Le Parisien » du 3 août. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a estimé à 13 Md€ le montant de la fraude sociale, dont 3 Md€ sont détectés et moins de 1 Md€ effectivement recouvrés (v. Repères, mars 2024). S’agissant du travail dissimulé, le projet prévoit une procédure de « flagrance sociale » inspirée de la « flagrance fiscale », qui permet de geler les comptes et de saisir les biens de l’entreprise incriminée pour éviter qu’elle n’organise son insolvabilité, ainsi qu’une solidarité financière du maître d’ouvrage lorsque ses sous-traitants sont convaincus de travail dissimulé. En ce qui concerne la santé, il est prévu d’élargir les échanges d’information entre les caisses d’Assurance maladie, l’administration fiscale et les complémentaires santé, d’imposer aux entreprises qui font du transport sanitaire d’embarquer un logiciel de géolocalisation pour éviter les abus, ainsi que de renforcer les contrôles sur les médecins qui délivrent trop d’arrêts de travail. Pour l’Assurance chômage, les allocations devront être obligatoirement versées sur un compte bancaire européen, et, en cas de fraude, la récupération des indus pourra s’opérer par la procédure d’avis à tiers détenteur auprès des banques ou des employeurs. Le Gouvernement veut également durcir les contrôles en matière de formation professionnelle et d’utilisation du compte personnel de formation, en particulier sur les formations en ligne et à distance et les organismes qui seront pris en infraction. Enfin les « revenus illicites  » issus du trafic de drogue ou d’opérations de blanchiment seront soumis à un taux de CSG majoré de 45 %.

FISCALITÉ ET PROCÉDURES FISCALES
->Politique fiscale

Un rapport du CPO sur la crédibilité des prévisions des recettes fiscales

Depuis la crise sanitaire, plusieurs États européens – dont la France – ont constaté des écarts importants entre les prévisions et les recettes publiques réellement perçues (v. Repères, janv. 2025). Un article publié début août dans le journal « Les Échos » a été intitulé « Pourquoi Bercy refuse par principe d’être prudent dans ses prévisions ? ». En effet, après deux années de dérapage des comptes publics, de nombreux spécialistes des finances publiques, à la Cour des comptes, au Parlement, au sein des universités invitent Bercy à établir des prévisions plus pessimistes. Le ministère des finances défend sa doctrine. Selon le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), dans une note rendue publique cet été, cela fragilise la crédibilité de la politique budgétaire, en sapant la confiance dans les règles budgétaires et leurs effets d’ancrage. Pour y remédier, les institutions budgétaires indépendantes (IBI), comme le Haut conseil des finances publiques (HCFP) en France, sont vues comme un levier essentiel pour garantir des prévisions plus fiables et objectives. Cette étude du CPO menée dans neuf États européens (dont l’Allemagne, la France, l’Espagne, ou le Royaume-Uni) distingue trois modèles : prévisions produites par l’IBI (Autriche, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni), prévisions validées formellement par l’IBI (Espagne, Italie), évaluation critique sans pouvoir contraignant (France, Allemagne, Portugal). Cette diversité reflète des différences de statut juridique, de moyens, d’indépendance et d’accès à l’information prévisionnelle. L’analyse montre que dans les États où l’IBI produit directement les prévisions, celles-ci sont moins sensibles aux révisions postérieures, même en période de forte incertitude comme après la crise sanitaire. Toutefois, la qualité globale des prévisions dépend aussi de la fiabilité des chiffrages de mesures nouvelles et de la capacité d’adaptation aux évolutions économiques. Dans le cadre de la réforme du Pacte de stabilité et de croissance (v. Repères, avril 2024), une évolution du mandat des IBI est attendue. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), dans sa note, identifie quatre axes pour renforcer le rôle du HCFP : améliorer l’accès à l’information, renforcer ses capacités techniques internes, donner plus de poids à ses avis, accroître son autonomie d’action. Une réforme de la LOLF serait donc sans doute nécessaire…

->Administration fiscale

Vers la fin des chèques pour s’acquitter du montant des impôts et amendes ?

L’usage du chèque recule fortement en France, notamment pour les paiements au Trésor public (impôts, amendes, droits…). En dix ans, le nombre de chèques encaissés par l’administration fiscale a chuté de 72 %, ne représentant plus que 4,5 % des paiements en volume et seulement 1 % en montant. Face à ce déclin, une réflexion est engagée par la DGFIP pour envisager la fin progressive de ce moyen de paiement. Aucun calendrier n’est encore fixé, mais la fermeture du dernier centre de traitement des chèques du Trésor en 2027 est évoquée. Aujourd’hui, les chèques représentent moins de 3 % des transactions globales en France. La carte bancaire et les solutions numériques (Lydia, PayPal, etc…) dominent largement. En plus d’être peu sécurisé, le chèque est jugé obsolète et risqué, notamment en cas d’absence de provision. Malgré tout, le chèque reste utilisé dans certains cas (caution, santé, matériel). Il est encore apprécié par certaines personnes âgées, souvent peu familières avec les outils numériques et parfois dépourvues de carte bancaire. La fin du chèque pourrait donc poser des difficultés. La France reste le principal émetteur de chèques en Europe : 88 % des chèques européens y sont émis, alors que plusieurs États comme la Suède ou l’Estonie les ont complètement abandonnés.

->Procédures fiscales

Le renforcement de l’arsenal gouvernemental de lutte contre la fraude fiscale ?

Le Gouvernement prépare un projet de loi contre la fraude sociale et fiscale (v. supra.), avec pour objectif de récupérer 2,3 Md€ supplémentaires dès 2026, après 13 Md€ récupérés en 2024 (v. Repères, janv. 2025). Ce texte, dont le journal « Les Échos » ont obtenu une version, comprendrait 20 articles visant trois axes principaux : améliorer la détection des fraudes, renforcer les sanctions, assurer un meilleur recouvrement des montants fraudés. Outre la priorité donnée à la lutte contre la fraude sociale (v. supra.), le texte prévoit aussi un élargissement des échanges de données entre les organismes de la Sécurité sociale, la DGFIP, la DGDDI et les mutuelles (sans oublier la jurisprudence du Conseil constitutionnel) ; l’obligation de géolocalisation pour ambulances et taxis conventionnés afin de limiter les fraudes au transport sanitaire. Il s’agit de mesures controversées car certaines dispositions (géolocalisation, surveillance et échanges de données) font déjà réagir les professionnels concernés. Une mission a été confiée début juillet 2025 à deux avocats experts (Me Caroline André, avocate associée spécialisée en droit social au sein du cabinet Jeantet, et Me Jean‑Pierre Lieb, ancien haut responsable de l’administration fiscale, avocat associé du cabinet EY) pour définir un climat de confiance entre entreprises et administrations fiscales et sociales, et proposer des mesures d’amélioration de la relation fiscale. Leur rapport est attendu pour le 15 octobre 2025. Afin de consolider ces avancées, plusieurs axes de travail seront approfondis, parmi lesquels : simplifier l’application du droit, en clarifiant les règles complexes et en renforçant les outils d’accompagnement ; améliorer les dispositifs de régularisation spontanée, pour favoriser une résolution apaisée des litiges et ainsi renforcer le recouvrement ; accompagner les entreprises à l’international, en prenant en compte leurs spécificités et les attentes des investisseurs étrangers.

MANAGEMENT PUBLIC
->Fonction publique d’État

Les effectifs du ministère des Armées en forte hausse

Le ministère des armées a publié son Rapport Social Unique qui met en avant l’atteinte de ses objectifs en matière de ressources humaines ; notamment en termes de croissance des effectifs. Après trois années de sous-réalisation de ses schémas d’emploi, le ministère des armées est revenu en 2024 sur la trajectoire de croissance prévue par la loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030. Avec 26 518 recrutements et une baisse de 12 % des départs, il se rapproche de l’objectif de 275 000 civils et militaires d’ici 2030. Ce redressement est attribué à la mobilisation coordonnée des acteurs des ressources humaines et à la mise en œuvre de la démarche « Fidélisation 360 » lancée en 2024, qui combine 33 mesures pour améliorer les conditions de travail, compenser les sujétions, accompagner la mobilité et les familles, et individualiser les parcours. Parallèlement, une nouvelle politique de rémunération achevée fin 2023 a produit ses effets en 2024, avec des revalorisations ciblées (indemnités IFSE, rebasages, convergence indemnitaire, revalorisation des contractuels). La politique de ressources humaines à l’horizon 2035 fixe désormais de nouveaux objectifs : valoriser l’engagement, construire un modèle de ressources humaines plus agile et transformer la fonction des ressources humaines, notamment via la simplification des processus et l’exploitation de la donnée.

L’État transpose la réforme de la haute fonction publique aux corps techniques de l’État

Deux décrets publiés le 15 août 2025 officialisent l’alignement des statuts et des carrières de quelque 5 000 ingénieurs des grands corps techniques de l’État (Corps des mines, Corps de l’armement, Corps des Ponts, des Eaux et des Forêts et INSEE) sur ceux des administrateurs de l’État, à compter du 1er décembre 2025. Le premier décret, très structurant, prévoit un alignement des grilles indiciaires et une division en trois grades, crée une instance de gouvernance interministérielle commune, ouvre de nouvelles voies d’accès (troisième concours, concours réservé aux docteurs) et institue un nouveau corps « d’ingénieurs de la statistique, de l’économie et de la donnée » issu de la fusion des administrateurs et inspecteurs généraux de l’Insee. Le second texte précise le nouvel échelonnement indiciaire applicable.

Le nombre d’apprentis en baisse dans la fonction publique

Des statistiques publiées par la DGAFP montre que le nombre d’apprentis est en baisse dans la fonction publique. Après trois années de hausse, les recrutements d’apprentis ont diminué en 2024 dans la fonction publique, avec 24 140 nouveaux contrats, en recul de 2,2 % selon la DGAFP. Dans le même temps, le secteur privé progresse de 3,7 %. Cette stagnation intervient malgré l’objectif fixé par le Chef de l’État d’atteindre un million d’apprentis d’ici la fin de son second quinquennat et une circulaire de Matignon incitant à renforcer leur accueil (v. Repères, août 2024). La baisse touche surtout la fonction publique hospitalière (-7,1 %) et l’État (-3,4 %), tandis que la territoriale, premier recruteur d’apprentis, résiste mieux (-0,6 %) – malgré un contexte de financement plus contraint qui a conduit le CNFPT à instaurer un numerus clausus ciblé sur les métiers prioritaires. Les ministères concentrent deux tiers des apprentis de l’État, mais y ralentissent leurs embauches pour raisons budgétaires. Globalement, 70% des contrats dans la fonction publique préparent un diplôme de l’enseignement supérieur (contre 60 % dans le privé), proportion en hausse continue, notamment dans la territoriale (+14 % depuis 2018).

->Fonction publique territoriale

La réforme de la haute fonction publique continue de se transposer à la territoriale

Trois décrets publiés le 21 août 2025 alignent désormais le corps des administrateurs de la Ville de Paris sur celui des administrateurs de l’État. Cette mesure prolonge l’essaimage de la réforme de la haute fonction publique à de nouveaux corps dirigeants, après les grands corps techniques de l’État (v. ci-dessus) et avant les directeurs d’hôpital ou les administrateurs territoriaux. Le texte principal crée un statut particulier calqué sur celui des administrateurs de l’État : division en trois grades (avec un grade transitoire à 37 échelons) et avancement conditionné à des mobilités. Il instaure aussi une nouvelle voie d’accès pour les fonctionnaires de catégorie A ayant exercé pendant cinq ans des responsabilités de direction à Paris, et met en place un collège du corps, chargé de la gestion des parcours, du pilotage des recrutements et de la cohérence des rémunérations. Deux autres décrets définissent l’échelonnement indiciaire (identique à celui des administrateurs de l’État) et classent les emplois de direction de la capitale en quatre niveaux « accélérateurs de carrière », permettant une progression plus rapide. Les administrateurs de la Ville de Paris intègrent ainsi pleinement l’architecture rénovée de la haute fonction publique.

->Transitions

Un livre blanc pour développer l’attractivité des DSI dans le secteur public

Un livre blanc publié par Inops et Losam propose des leviers pour renforcer leur attractivité, en s’appuyant sur les témoignages de DSI de l’URSSAF, du ministère de l’Agriculture, de la Région Île-de-France et de l’Éducation nationale. En effet, les directions des systèmes d’information (DSI) de la fonction publique peinent à rivaliser avec le secteur privé, notamment en raison de salaires moins compétitifs. Pour recruter, le livre blanc recommande de diversifier les canaux : apprentissage, partenariats avec des écoles, recours à des contractuels ou à des chasseurs de tête, tout en valorisant le sens du service public. Si les recrutements externes échouent, un effort de formation et de détection des talents internes est préconisé. Le document insiste aussi sur la nécessité de mieux prioriser les demandes numériques, en s’appuyant sur des critères objectifs et chiffrés, et de renforcer le dialogue entre opérationnels et techniciens. Il plaide également pour une proximité accrue avec les directions générales et la nomination d’un DSI de l’État pour unifier les stratégies.

FISCALITÉ EUROPÉENNE ET INTERNATIONAL
->Fiscalité européenne

TVA sur l’électricité : la France choisit d’aligner l’abonnement sur le taux normal

Le 1er août 2025, le taux de TVA sur l’abonnement d’électricité est passé du taux réduit de 5,5 % au taux normal de 20 %. C’est le choix français pour l’application de la directive européenne qui demande à ce qu’il n’y ait pas de dissociation de taux entre l’abonnement et la consommation. Ainsi, à l’étranger, si l’Allemagne soumet l’ensemble au taux normal de 19%, la Belgique ou l’Italie appliquent un taux réduit (de respectivement 6 % et 10 %).

->Relations multilatérales

Les détails de « l’Accord » commercial UE-USA sur les droits de douane

Le 21 août 2025, l’Union européenne et les États-Unis ont publié une déclaration conjointe précisant le contenu de l’accord commercial conclu le 27 juillet instaurant des droits de douane de 15 % sur les produits européens exportés aux États-Unis à compter du 7 août 2025. Ce droit de douane de 15 % inclut le tarif résultant de la clause de la nation la plus favorisée (NPF). Donc, les secteurs assujettis à des tarifs supérieurs à 15 %, en application de la clause de la NPF, ne sont pas soumis à des tarifs supplémentaires. Par ailleurs, les droits de douane réciproques sur plusieurs produits stratégiques sont levés (droits « zéro pour zéro  »). À compter du 1er septembre, certains produits bénéficieront ainsi d’un régime dérogatoire : seuls les tarifs NPF s’appliquant. Il s’agit des ressources naturelles « indisponibles », des équipements aéronautiques, des produits pharmaceutiques génériques et des précurseurs chimiques. L’acier et l’aluminium ne sont pas concernés par ces mesures de faveur (pas plus que le luxe et les alcools). En contrepartie, la Commission s’est engagée, sans en avoir les moyens qui relèvent de chaque État-membre, à acheter dans les trois prochaines années aux États-Unis de l’énergie (pétrole et gaz), pour 750 Md$, des équipements militaires et des puces d’intelligence artificielle pour 40 Md$. Puis, la Commission européenne a présenté le 28 août deux propositions de réductions des droits de douane afin que les États-Unis pratiquent, rétroactivement à partir du 1er août, un allègement tarifaire en faveur notamment du secteur automobile de l’UE.

->Fiscalité internationale

Début des négociations de la convention cadre de l’ONU

Le 7 août, le secrétariat général de l’ONU a annoncé la nomination de 25 nouveaux membres au comité des experts des Nations-Unies sur la coopération internationale en matière fiscale, dont le français Antoine Guici, chef de section au bureau E1 de la Direction de la législation fiscale (DLF). Le comité avait adopté le 31 juillet ses méthodes de travail. Puis, du 4 au 15 août 2025, ont débuté à New York les première et deuxième sessions de négociation de la convention-cadre de coopération fiscale internationale (CCFI) de l’ONU. Le 25 août, les unions internationales de syndicats ont revendiqué en marge de ces réunions une « fiscalité équitable est vitale pour financer l’emploi, les salaires et les services publics ». Les échanges entre États membres se poursuivront jusqu’en 2027.

->Monnaies

La Fed sous pression : tentative de révocation d’une gouverneure

Le 22 août, lors du symposium annuel de la Réserve fédérale (Fed) à Jackson Hole dans le Wyoming, son président Jérôme Powell a à nouveau défendu l’indépendance de son institution dans la détermination de la politique monétaire. Face aux risques inflationnistes présents et futurs, s’il n’a pas fermé la porte à une baisse des taux, il est resté mesuré. Insatisfait, le 26 août, le président de l’Union a révoqué une gouverneure nommée par son prédécesseur dans le but explicite de la remplacer par un de ses conseillers, partisan d’une baisse immédiate des taux d’intérêt. Le dollar a chuté sur les marchés. La révocation est entre les mains de la Justice.

FINANCES PUBLIQUES EUROPÉENNES
->Politique européenne

Le financement de la défense européenne

Selon la Commission européenne, 18 États membres (Belgique, Bulgarie Chypre, Croatie, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovénie et Slovaquie) avaient officiellement fait appel, le 29 juillet, aux prêts de l’instrument SAFE (v. Repères, juillet 2025). Les demandes cumulées représentaient d’ores et déjà 127 Md€ pour une dotation qui est plafonnée à 150 Md€. Fin août, le Danemark et l’Irlande ont également fait appel à l’instrument SAFE afin d’accroître leurs dépenses militaires.

->Budget européen

Le soutien financier de l’Union européenne à l’Ukraine

La Commission européenne a annoncé, le 22 août, qu’elle procédait au versement à l’Ukraine d’une enveloppe de 4 Md€ au titre des deux aides macro-financières agréées par l’UE. Début août, le Conseil avait validé l’évaluation selon laquelle les autorités ukrainiennes avaient désormais bien mis en œuvre les 13 réformes auxquelles était conditionné le soutien financier de l’UE. L’Ukraine a ainsi reçu une somme de 3,05 Md€ au titre de la Facilité pour l’Ukraine, ce qui porte à 22,7 Md€ les montants accordés dans le cadre de cet instrument financier qui est doté de 50 Md€ sur la période 2024-2027. La Commission a par ailleurs versé à l’Ukraine 1 Md€ supplémentaire correspondant aux prêts préférentiels accordés par les États du G7, qui sont gagés sur les profits réalisés sur les avoirs de la Banque de Russie immobilisés dans l’UE. Celle-ci aura ainsi versé 9 Md€ d’aide dans ce cadre.

->États membres

Le test de résistance des banques européennes au sein des États

L’Autorité bancaire européenne (EBA) a estimé, le 1er août, que les banques européennes étaient plus robustes en 2025 qu’en 2023. Elle a dressé ce constat à l’issue de son exercice biennal de « stress test » bancaire. Selon l’EBA, en cas de matérialisation d’un scénario macro-économique adverse, les 64 banques analysées (dont 51 établies dans la zone euro), qui représentent 75 % des actifs bancaires totaux de l’UE, subiraient des pertes en capital cumulées de 547 Md€ sur trois ans. Ces pertes seraient réparties entre 394 Md€ de risques de crédit (347 Md€ en 2023), 98 Md€ de risques de marché et 55 Md€ de risques opérationnels. Bien que le niveau de pertes soit supérieur en valeur à celui de 2023, les banques analysées disposeraient d’une capacité accrue à générer des revenus, ce qui leur permettrait de mieux absorber les pertes et de limiter la diminution de leurs fonds propres par rapport à la situation observée en 2023. En outre, les banques ont abordé l’exercice 2025 dans une meilleure situation financière grâce notamment à un niveau de profitabilité supérieur à celui de 2023. Selon l’EBA, ces tests doivent surtout aider les superviseurs bancaires dans leur exercice de surveillance régulière des groupes bancaires concernés.

->Euro

Le niveau d’inflation dans la zone euro

L’Office statistique de l’UE a indiqué, le 1er août, que le taux d’inflation annuel dans la zone euro était resté stable à 2 % en juillet par rapport à juin. Des disparités étaient néanmoins constatées entre les États membres, certains d’entre eux ayant des taux d’inflation élevés (5,6 % en Estonie, 4,5 % en Croatie et en Slovaquie), là où d’autres États membres enregistraient des taux plus faibles (0,1 % à Chypre, 0,9 % en France, 1,6 % en Irlande). La hausse a été modérée en Allemagne (1,8 %) mais soutenue en Espagne (2,7 %). Les taux les plus élevés concernaient les services (1,46 %) l’alimentation, l’alcool et le tabac (0,63 %) devant les biens industriels hors énergie (0,18 %) et l’énergie (- 0,23 %).

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Aurélien BAUDU (Fiscalité et procédure fiscale – Coordination)

Fabrice BIN (International et Fiscalité européenne)

Florent GAULLIER-CAMUS (Budget de l’État et opérateurs – Comptabilité publique)

Léonard GOURBIER (Management public)

Matthieu HOUSER (Finances locales)

Philippe DELIVET (Finances publiques européennes)

Yves TERRASSE (Finances sociales)